dimanche 11 octobre 2015

Je suis un être humain






Quand j'ai réalisé que je vivais bel et bien avec une schizophrénie, mon diagnostic ne m'était pas inconnu. Cela faisait des années que mon psychiatre me l'avait fourni, en l'expliquant de manière sans doute évasive, mais j'ai totale confiance en lui et je ne me trouvais pas dans des dispositions où j'étais capable de l'entendre, comme il se dit. f25.1 : troubles schizo affectifs.

Par là même, je n'avais jamais googlé ni fait aucune recherche sur ce terme, et la seule question que j'ai posée à ce médecin était "C'est quoi ?" et suite à "des troubles schizo avec de petits troubles de l'humeur" je m'étais dit qu'il s'agissait de troubles bipolaires avec le "schizo" qui était un peu là pour décorer, pirouli piroula.

Donc, en décembre 2014 il y eu déchirure dans ma psyché et la vérité 'est fait jour en moi, un peu comme une révélation : omfg, je suis schizophrène.
Le plus gros du choc passé et une fois rentrée chez moi, j'ai enfin fait ce que font tous les gens qui ont une maladie et ne savent pas trop par où commencé : j'ai tapé "troubles schizo affectifs" dans le moteur de recherche et vu quelques résultats "pertinents" sous mes yeux.

Le premier était "ma copine est schizo affective" sur un forum. Je n'aurais pas du cliquer, il s'agissait du même forum qui persuade n'importe quel grippé qu'il a un cancer. Bref, la petite amie de ce jeune homme s'était outée à lui et lui avait annoncé ce diagnostic et la question qu'il posait n'était pas sur le pronostic, la qualité de vie ou comment l'épauler dans les troubles.
C'était
"Peut-elle éprouver des sentiments pour moi ?"

J'en profite hein, parce que la question revient.
Des choses ont fait du mal - d'abord l'image des schizophrènes via Hollywood, les séries sur les serial killers et les thrillers sur le même thème (merci les gars-meufs). Donc non, une fois pour toute, les schizophrènes n'ont pas de double personnalité, n'ont pas des migraines puis endossent une tout autre personnalité, n'assassinent pas leurs proches dans leur sommeil car ils pensent être Ragondin le Vengeur, aucune de ces dukaneries. Ces clichés psychophobes ont fait du mal, beaucoup.

Surtout, ce que la question évoque c'est "est-elle un être humain ?" "est-elle une maladie ?". Il faut se rappeler également, et ça, c'est la mierda aussi, que si on trouve les signes cliniques les plus courants de "la Schizophrénie", avec "dissociation" et "délires", on trouve "froideur affective"
C'est tout relatif.
Peut-être que cela arrive, peut-être que les sentiments sont organisés différemment, je ne suis pas devin, je ne suis pas mage, je n'en sais rien, mais la plupart des schizoprhrènes que j'ai connu, ça en fait quelques uns, n'étaient pas du tout froid, je ne le suis pas non plus, oui, j'érpouve des sentiments, oui, parfois je suis délirante ou sub-délirante, mais mes sentiments ne sont pas des "idéations délirantes", non, ils ne changent pas du jour au lendemain, oui, quand j'aime quelqu'un je l'aime "pour de vrai", ce n'est pas une vue de l'esprit qui serait produite par mon cerveau malade, et enfin, et surtout, mes délires, mes hallus, ma bizarrerie, sont produits par moi-même, Julie, ils sont le reflet de mes vrais sentiments, souvent de mes vraies pensées, sans doute de mon vrai inconscient qui s'exprime ainsi, de manière très cryptée (mais décryptable pour peu que l'on parle avec moi, que l'on me connaisse), je ne suis pas "Mme F25.1" je suis une personne, j'appartiens à l'espèce humaine, et cela m'est une violence terrible que l'on me considère comme John Merrick (ainsi le choix de l'illustration tirée d'Elephant Man de David Lynch) : "je ne suis pas une maladie, je ne suis pas un mosntre, je suis un être humain"

Ceux qui compte savent. On peut m'apprécier, me mal apprécier, être indifférent.e à moi, mais ce serait chouette si c'était pour moi, pour la personne que je suis, et non parce que je vis avec une schizophrénie.

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