lundi 26 octobre 2015

Préoccupée

Je suis préoccupée sans cesse, je suis inquiète. Ce n'est pas vraiment une angoisse flottante, plutôt un bruit
Un bruit de fond sans cesse
Une morbide tâche de fond qui tourne
L'actualité m'inquiète, celle de la France et celle du monde. Mais elle est préoccupante n'est ce pas ?
Je me dis oh nom de dieu c'est la merde mais qu'est ce qu'on va devenir, tous ? J'entends le bruit des bottes j'entends la mitraille la pluie de sang et les nuages de sauterelles vrombissant, j'entends le sang battre à mes temps, mon cerveau vibre et le creux se forme entre mes côtes, mais que vais-je devenir
Une cacophonie ténue mais persistante un nuage au dessus de mon ciel, qui le plombe, que j'appelle pompeusement la grande aile noire
Elle n'est pas noire de fait mais violette ciel d'orage, violette ecchymose comme les ailes des petits chagrins qui descendaient autrefois se coller à mon sternum et pomper la douleur de leur rostre
Je suis préoccupée, je m'inquiète pour L. Pour sa santé bien sur pour son bien être surtout pour son bonheur. Je voudrais tant le rendre parfaitement heureuse mais je ne suis pas parfaite, je m'inquiète pour son vieillissement moi qui lui rends quelques années, lui dit qu'il me virera quand il perdra son autonomie et je me demande
C'est un dilemme
Je me demande ce qui serait pire pour lui, vieillir et mourir seul ou vieillir et mourir sous mon regard ? Devrai-je ne pas l'écouter et rester à ses cotés ? Sera-ce l'humilier inutilement ? Et moi à qui on a donné la vie et le reste, ne pourrai-je rien rendre de ce soin aux autres, à mon autre si tendrement chéri ? Je réfléchis beaucoup à cette question, je fais de terribles, voraces réserves de bonheur et de bien-portance parce que si, ça aide à moins s'écrouler quand advient le pire qui advient toujours, toujours
Je me demande, s'il en vient à ne plus m'aimer, me désirer ? Ces choses là arrivent. Outre moi, j'ose espérer qu'il ne restera pas avec moi par devoir, car cela le rendrait malheureux, quelle punition alors pour nous deux
Je m'inquiète pour ma santé. Mes poumons se fanent peut être qu'un nénuphar y pousse, la blonde camelle commence à avoir raison de leur belle amplitude. Respiro. Quand respirer devient difficile, la peur encore serre le thorax, la grande vis et l'écrou qui serre le dos. Et si c'est moi qui deviens dépendante la première, que ferais je, que ferons nous ? Et ça me paralyse et au lieu d'être pertinente et de jeter les clopes au feu je les cherche encore plus fébrilement du bout de les ongles peints en noir et en rouge, je tête la clope avec l'envie de pleurer et des visions de sanatorium, en priant mes démons pour que celle là encore m'apaise. Juste encore une fois S'il-vous-plait.
Mon genou, celui plein d’arthrose, tiendra-t-il encore longtemps ? Ma belle enveloppe corporelle fragile et solide, si bien foutue mais si vulnérable, mon coffre mon armure de chair, qui a toujours été loyale et que j'ai si peu respecté
Je m'inquiète pour mon père, comment vieillira-t-il lui qui est déjà vieux et diminué ? Et ses capacités cognitives qui se rétractent comme un escargot dont on touche les yeux du bout du coussinet ? Comment l'aiderai-je ? Pourrai je le sortir de l'hiver ?
Et ma maman, quand elle mourra ? Cela ne me semble pas possible elle est presque mon univers, ma part solide, durant si longtemps j'ai été son prolongement. Comment lui survivre ? Pour quoi lui survivre ?
Et je m'inquiète surtout sur la fin de mon temps, quand sans enfants, la plus jeune de la famille, plus jeune que mon très bel amour, je serai seule et encore plus incapable de m'occuper de moi même. Mais pour ce cas une pensée me rassure et me console profondément, car un grand courage que j'ai toujours eu est d'être capable de mettre fin à mes jours dignement et sans embêter personne
Dans ce capharnaüm qu'est la vie, dans cette impermanence, ces sables mouvants, les projets de mort m'aident à survivre à ma folie.

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