jeudi 14 janvier 2016

Nuanc(i)er



Car non il n'existe pas de vils psychophobes vs moi-même qui serait clairvoyante sur tout même sur moi (bonne blague)
Car non le monde et les habitants qui le peuplent ne sont pas tout bleu tout rouge.
Une tentative de nuancer, que je sens nécessaire pour mes réflexions, et pour ma cohérence, pour une "moi-une" en dégradés, entourée de gens l'étant tout autant.

Je commence par ce que j'appelle la "tombée du déni".
Car il y a un "avant" et un "après" mais la prise de conscience a pris des années et des années.

Cela venait de moi au départ, moi clivée malade-pas malade, moi clivée toute puissante-toute impuissante, moi clivée géniale-misérable, mopi clivée soignante-soignée.
Moi paradoxe.
Et ces réalités coexistaient, parallèles, sans jamais se rejoindre. Le déni est cela, savoir sans savoir (se référer au tout premier billet du blog)

Cela venait de moi au départ, me dépouiller de la terminologie médicale, libérer ma pensée et mon point de vue du prisme psychiatrique, psychanalytique. Ne plus parler de moi comme d'une étude de cas, me réhumaniser. Ne plus être ma seule soignante qui elle seule saurait, tout en demandant aux soigant.e.s alentours de me prendre en charge car iels sauraient tout (en même temps)
Ce fut accepter d'être humble, accepter de ne pas comprendre grand chose, accepter que souvent je ne savais pas, me réinvestir comme une personne humaine, souffrante parfois, lâcher prise sans lâcher la barre.

Il y eut ensuite le travail par la parole avec une très précieuse psychologue, J. Qui me parlait de ces parts de moi, "Ju malade" vs "Ju saine" (les termes sont bof mais ils étaient alors miens) en m'enjoignant de les rassembler.
Car je refusais de réaliser ma schizophrénie, je souffrais certainement d'autre chose pas très grave.
Le travails a duré deux ans, immensément bénéfique, puis s'est inbterrompu d'un commun accord : nous avions fait le tour.

Et puis, la rechute alcoolique. Les rechutes alcooliques. A V*** je me suis rendue à l'hôpital rencontre une addictologue et là, premier point de vue étrange. Elle me demande où je vis et je réponds que bien qu'ayant un studio en Haute-Savoie je loge actuellement chez mon compagnon, séparé de corps depuis 3 ans et en instance de divorce.
Elle résume ainsi
*"Donc vous vivez chez un ami qui est marié et a deux enfants"
Violence. Mais je souris de cet autre point de vue, factuellement pertinent, mais aux consonances glauques. Pour la première fois j'accepte le C'est vrai, on peut voir ça comme ça
Même si ça me semble moche et rude.

Puis la cure, et l'accent était mis sur l'authenticité. J'ai saisi cela, dans une grande volonté d'aller au fond des choses, de ne plus mentir. Je vois maintenant que le fait que je ne supportais plus le mensonge, mentir, dire des demi vérités comme une autre fenêtre vers une vérité autre.

Oui, le psychiatre, avec mon accord enthousiaste, a bouleversé mon traitement. Oui je lui ai dit que je n'étais pas schizophrene, mais purement bipolaire, que mes "délires" étaient d'origine toxique, que que... Mais le changement de traitement seul ne m'a pas poussée à cette décompensation très atypique chez moi.

Oh, alors je me serais trompée ...?

La séance de groupe avec la psychologue a ferré mon esprit, quand j'ai parlé longuement de ma mère d'une voix très monocorde, il y eu une question finale et les mots de cette psychologue "pourquoi Julie ne comprend pas mle second degré"

Mon moi infirmière s'est révolté,; j'ai ouvert la bouche et dit "je ne suis pas..."
psychotique qui ne comprend pas le second degré
Je l'ai refermée et vlan, j'ai pris cette part de la réalioté dans la face.
Troubles schizo affectifs c'est schizophrénie et troubles bipolaires.
Je suis schizophrène
Julie G est schizophrène.

Je suis restée 15j environ stuporeuse, très souffrante et dans un état de douleur psychique que je ne peux pas décrire, parce que je n'en avais jamais entendu parler.

Mais les choses se sont "mises en place" assez rapidement. Je me rappelle qu'une des premières choses "rationnelles" que j'ai pu me dire a été "mais ma famille, des ami.e.s, m'apprécient et m'aiment. Mais alors si malgré tout ce que j'ai fait, iels m'aiment, c'est que je dois être aimable"
Je m'apprenais que je pouvais être insupportable par moment mais avoir des qualités.
Je tombais ma psychophobie intériorisée. Je nuançais ma part "persécutée". Ce que les psychanalystes appellent les "mauvais objets" se trouvaient nuancés en moi. Une infinie palette, une profonde liberté, un horizon.


Bien évidemment ça n'a pas été "omg je réalise, je vais dorénavant bien"

Justement
Ca n'irai jamais parfaitement bien, j'aurai toujours un sale lot d'angoisse, des hallus par moments, je suis susceptible de délirer, de dé"compenser mes troubles schizo comme bipolaire, les deux allant ensemble, joyeusement accompagnés d'alcool.
Alors accepter. Cela date de decembre 2014 et je ne peux pas dire que je sois en paix totale.
J'ai traversé les étapes du deuil, ou de l'acceptation, j'ai été très depressive, très en colère, très dans un chantage interne avec des pensées magiques, si je fais comme ceci comme cela alors ça ira pour toujours.
J'ai encore maintenant souvent la hargne ou un agacement profonde, lourdeur des soins et du suivi, limitations qui me frustre, handicap.
Mais enfin, je me nuance. Je nuance les autres, mieux. Me reste à mieux nuancer ma pensée, que j'émaille d'exemples bancals et de transpositions sauvages, de parti pris, de simplifications un peu barbares.

Je n'en veux à personne de ne pas me comprendre ou de me mal comprendre. Qui comprend qui ? Si je suis seule dans ma tête ce n'est que condition du vivant.

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